Imaginez une arnaque où la victime, manipulée psychologiquement, effectue elle-même le virement vers le compte du fraudeur. C’est tout le principe de la fraude aux paiements push autorisés (APP), une technique redoutablement efficace qui ne cesse de gagner du terrain.Le dernier rapport de LexisNexis Risk Solutions, publié ce mardi 13 mai, lève le voile sur cette mécanique bien rodée, au cœur de laquelle opère un acteur clé : la mule financière. Discrète mais essentielle, elle fait disparaître l’argent en quelques minutes, souvent sans laisser de trace.
La fraude APP, aussi appelée fraude au virement bancaire, repose sur un triangle d’acteurs :
Les données de LexisNexis révèlent le rôle stratégique des mules : certaines peuvent ouvrir plusieurs comptes bancaires et cryptos en quelques semaines, opérant des transferts progressifs, d’abord de quelques euros, avant de traiter des montants dépassant 1 000 €.
Elles sont extrêmement réactives, surveillant l’arrivée des fonds et les transférant dans les minutes qui suivent, à la manière d’un trader à haute fréquence. Un exemple documenté montre un dépôt de 50 £ immédiatement suivi d’un retrait de 48 £. Le tout sans attirer l’attention.
Cette fraude prend une ampleur internationale. Le Royaume-Uni est particulièrement touché, avec une hausse de 65 % des mouvements liés à des mules en un an, pour un préjudice estimé à plus de 130 millions de livres sterling.Le rapport décrit une organisation quasi-militaire :
Ces structures complexes exploitent aussi les échanges de cryptomonnaies, qui rendent les fonds quasiment intraçables une fois convertis et déplacés à l’étranger.
Face à des fraudeurs de plus en plus agiles, les institutions financières contre-attaquent avec des solutions basées sur l’intelligence artificielle (IA).Grâce à des systèmes de détection comportementale, l’IA peut identifier des modèles de connexions et de retraits anormaux, souvent invisibles à l’œil humain. Dans un cas cité par LexisNexis, un système bancaire a vu son taux de détection passer de 0 % à 100 % après optimisation par IA. Un tournant majeur pour la protection des clients.
Le Royaume-Uni a pris les devants avec un système de responsabilité partagée entre les banques émettrices et réceptrices. Ce modèle incite les établissements à renforcer leurs contrôles anti-fraude.En revanche, l’Union européenne reste en attente de la finalisation de PSD3, sa nouvelle directive sur les services de paiement, qui devrait apporter plus de clarté et d’outils réglementaires face à ces nouvelles formes de fraude.
La fraude aux paiements autorisés (APP) repose sur la manipulation, la rapidité et la discrétion. Les mules financières sont au cœur de ce dispositif, capable d’orchestrer des transferts complexes, souvent indétectables.
Mais la riposte s’organise : entre intelligence artificielle, réglementation renforcée et coopération internationale, le combat contre ce fléau numérique est lancé.
source: www.clubic.com